Depuis la LRU se réunit chaque semaine à Grenoble un Comité de mobilisation, dont je fais partie (appelé généralement Comob'). En décembre, l'idée d'une occupation de la fac de lettres Stendhal dès la rentrée du second semestre a été adoptée. Le but était d'occuper la fac jour et nuit, sans pour autant bloqué les cours, afin de pouvoir organiser notre mouvement et inonder le campus d'information et de propagande politique, tout en développant un lieu de vie alternatif. Stendhal a été choisi parce que la présidente Lise Dumasi est connue pour s'être opposer publiquement dans la presse notamment à la LRU, au plan Campus et aux autres réformes qui cassent aujourd'hui l'enseignement supérieur comme service publique (je vais pas réexpliquer ici les réformes, ça serait trop long).
Lundi 19 janvier, nous sommes donc arrivé à Stendhal vers 16h avec tout notre matériel pour l'occup' (cuisine, matelas...) et nous avons commencé à nous installé dans le hall nord. Vint alors deux syndicalistes, qui ont commencé à nous gueuler dessus en nous disant que ce qu'on faisait là était contre-productif. Que ça allait faire fuir les profs qu'ils avaient tout juste réussi à convaincre qu'une réelle mobilisation est nécessaire. Or, comme vous avez pu le constater, depuis l'hiver dernier, dans les facs, il ne s'est strictement rien passé. Donc niveau productivité, les syndicats ne devraient pas trop se la ramener, à mon avis.
Puis arrive le vice-président, suivi de la présidente de l'université. Ils s'opposent fermement devant tout le comob' à cette occupation de nuit, pour des questions de responsabilité, et en nous répétant la même chose que les deux syndicalistes. On leur demande si on doit envisager un débarquement de flics, ils nous répondent que ce n'est pas exclu, qu'ils en discutent et qu'ils viendront nous prévenir si c'est le cas. Ils nous proposent également un compromis : on n'occupe pas la nuit, et en échange on a à notre disposition un amphi de jour, jusqu'à la fermeture, soit 20h-20h30. On refuse, pour nous ce n'est pas suffisant.
Vers 18h45, sans avoir été prévenu, la fac est encerclée de flics : CRS, Brigade d'intervention mobile, BAC. Au total 5 fourgons (au moins) et 5 voitures de la BAC... pour 60 étudiants.
Vu comment ces derniers temps l'antiterrorisme est devenu un véritable mode de gouvernance, nous partons avant toute intervention de la police qui se serait sans doute soldé par quelques arrestations 'de prévention' (on s'est demandé qu'après pourquoi on était parti mais bon ...). C'est donc masqués et chantant La Semaine Sanglante que nous sortons tous groupés (on aurait dit un véritable déplacement de réfugiés)
Le mardi 20/01, 12h30 : AG rassemblant enseignants-chercheurs, IATOS, et étudiants. Environ 400 personnes. Ont été votés :
- la grève générale pour le 29
- le blocage des facs le 29 si la banalisation n'est pas acceptée
- la rétention des notes
- le soutien et l'opposition de l'AG à toute intervention policière sur le campus
Ont été évoquées :
- l'occupation jour et nuit profs et étudiants après le 29 si nos revendications ne sont pas entendues
- la grève générale illimitée après le 29 si nos revendications ne sont pas entendues
Quelques clashs encore entre syndicats et comob'
Nous prévoyons alors de retenter une occupation de Stendhal à partir de 16h.
Vers 15h, Stendhal ferme ses portes. Fermeture administrative pour éviter toute tentative d'occupation de notre part.
Effet papillon : l'Université Pierre Mendès France (sciences humaines) ferme également à 16h. Selon les rumeurs "des étudiants extrémistes bloquent Stendhal et risquent de venir bloquer également l'UPMF" (il y aurait aussi des "risques d'émeus"... oui oui des émeus en plein Grenoble ^^)
Le Comob' se réunit à nouveau : l'idée d'une occupation nocturne est momentanément abandonnée, du moins jusqu'au 29/01, et on accepte le compromis proposé par la présidente. Néanmoins on rédige le soir même un tract sur les événements de la journée.
Le mercredi 21/01, diffusion massive de tracts dès 9h. Une délégation du Comob' se rend à Stendhal rencontrer la présidente pour obtenir un amphi. Suite à une gaffe au secrétariat, on apprend ainsi qu'une réunion entre la présidence et les organisations syndicales se tient le jour même, réunion qu'on nous a bien caché. Visiblement, on tient à écarter le Comob' de la mobilisation, alors que la veille les syndicats appelaient à plus de coordination entre les organisations.
On obtient un amphi.
Jusqu'au 29 il va se dérouler dans cet amphi toutes sortes d'activités (projections, théâtre, conférences, débats...), voir sur indymedia grenoble.
Le mouvement se construit, et la fermeture administrative nous a aidé malgré nous à provoquer de réels remous sur le campus.
Affaire à suivre, je vous donnerais des nouvelles
Voici le communiqué de la présidence de Stendhal, voyez comme le comob' y est traité...
- Citation :
- Communiqué de la Présidence de l’Université Stendhal
Lundi 19 janvier, dans l’après-midi, un groupe d’une trentaine de jeunes
s’autoproclamant « comité de mobilisation des universités » s’est installé avec
matelas et couvertures dans le hall Nord de l’Université Stendhal avec
l’intention, exprimée explicitement, d’occuper l’université jour et nuit, et de
façon illimitée. Etant donné les graves problèmes de sécurité posés en
particulier par une occupation nocturne, la Présidente a refusé qu’ils restent
de nuit dans l’université. A l’issue de longues discussions menées par la
Présidente, le vice-président du CA et plusieurs responsables syndicaux, le
groupe, qui s’était progressivement étoffé (une soixantaine de personnes vers
19h) est finalement sorti de l’université, sans que l’intervention des forces de
police, un moment envisagée, ne soit nécessaire.
Le mardi 20 janvier, le même groupe a annoncé, lors de la tenue de l’AG
intersyndicale à l’amphi Weil son intention inchangée d’occuper l’Université
Stendhal à partir de 16h, sans limite de temps, ni mot d’ordre précis. Il a été
explicitement désavoué par l’AG sur ces objectifs. L’équipe présidentielle a
décidé une fermeture administrative de l’université le mardi après-midi. La
nécessité d’agir très vite n’a pas permis d’avertir les personnels de
l’université préalablement.
Nous restons très vigilants face à ces tentatives d’occupations,
particulièrement nocturnes, de la part d’un groupe qui n’est mandaté par
personne et n’annonce pas de revendication précise. Nous restons cependant
ouverts au dialogue, et recevons ce mercredi matin 21 janvier trois étudiants
appartenant au groupe.
Nous ferons tout pour éviter de faire intervenir les forces de l’ordre.
Toutefois, nous n’écartons pas cette hypothèse si le groupe tente d’imposer sa
présence de nuit. La question sera débattue dans la réunion des trois conseils
convoquée ce vendredi matin.
La Présidente de l’Université Stendhal
L’équipe présidentielle