Un homme est mort de froid en plein cœur de Paris,
place de la Concorde, dans la nuit du 20 au 21 décembre. A peine un
entrefilet dans les journaux. Le cas est devenu trop banal ; les
statistiques sont elles aussi glaçantes : il y aurait officiellement
200 personnes qui meurent de froid par an en France chaque année. Le
gouvernement avec son cynisme habituel se félicite même qu'il y en ait
si peu alors que le nombre de sans-abri ou de sans domicile fixe (SDF)
dépasserait le chiffre de 100 000, en augmentation constante, alors que
plus de 3 millions de foyers seraient "mal logés". Les télévisions nous
montrent régulièrement quelques foyers modèles du Secours Catholique
(avec chambres individuelles) et des reportages sur les rondes de nuit
du "SAMU Social". Cette publicité est bien obligée de concéder quelques
interviews moins idylliques de ces prolétaires survivant dans la plus
grande misère et qui refusent de se laisser "rafler" pour aller dans
les centres d'hébergement surpeuplés où il n'est pas possible de fermer
l'œil parce que la promiscuité est telle que chacun vit dans la crainte
permanente du vol ou de l'agression. Dans ces petits "camps de
concentration humanitaires", ils se disent beaucoup moins en sécurité
que sur leur bout de trottoir. Qu'importe : le message de la propagande
est bien là, martelée avec insistance : s'ils crèvent de froid, tant
pis, c'est de leur faute, c'est qu'ils le veulent bien ! La
spectaculaire intervention musclée des flics pour démonter les tentes
des "Enfants de Don Quichotte" sur les quais de Seine face au parvis de
Notre-Dame n'aura été qu'un événement médiatique qui se conclut deux
jours plus tard par un touchant consensus où chaque association et
chaque organisation caritative se félicite que le gouvernement ait
renouvelé ses belles promesses en termes de construction de nouveaux
foyers, de logements sociaux d'urgence ou de "droit au logement
opposable en justice". Evidemment, cela n'est que de la poudre aux yeux
: non seulement rien n'est réglé mais la situation ne peut qu'empirer
dramatiquement. Quelques jours auparavant, pour leur 22e anniversaire,
les "Restos du Cœur" ont mis en avant qu'ils avaient servi plus d'un
milliard de repas depuis leur création (82 millions en 2006 auprès de
700 000 personnes). Et leur fréquentation est en constante augmentation
(+5% par an) : avec l'emploi de plus de 51 000 "bénévoles", c'est
devenu la plus grosse entreprise caritative du pays. Les porte-parole
de l'État bourgeois ne nous parlent plus de "nouvelle classe" que
seraient les "nouveaux pauvres" comme il y a 20 ans ; la misère
croissante crève aujourd'hui les yeux. La question du logement, le coût
exorbitant des loyers, l'insalubrité du parc immobilier, la
multiplication des prêts immobiliers "à risque", liés au gonflement de
la spéculation immobilière, sont le creuset permanent de la
paupérisation croissante de la classe ouvrière qui se cumule avec tous
les autres facteurs de dégradation vertigineuses des conditions de vie
des ouvriers : la hausse du "coût de la vie", des produits alimentaires
de base, le déremboursement des dépenses de santé, l'aggravation de la
précarité de l'emploi, les menaces de licenciement et de chômage... Un
sondage récent a montré qu'une personne sur deux redoute de se
retrouver à la rue du jour au lendemain. Un autre chiffre semi-officiel
a été rendu public (encore très en dessous de la réalité) : il y aurait
plus de 7 millions de personnes qui sont aujourd'hui réduites en France
à survivre en dessous du seuil de pauvreté, y compris parmi des couches
de plus en plus larges de travailleurs salariés. Le déséquilibre et le
développement des inégalités sociales est aussi de plus en plus
manifeste, révélateur de l'aberration du mode de production capitaliste
et de sa faillite : d'un côté cette société sécrète une accumulation
ostentatoire de richesses et de fortunes colossales, l'étalage d'un
luxe artificiel et d'un train de vie tapageur pour une petite minorité
d'exploiteurs (y compris de ses couches parasitaires) et de l'autre de
plus en plus de prolétaires surexploités réduits à plonger dans la
détresse. Dans tous les pays, y compris les plus riches et développés,
le même phénomène permet de faire le même constat. Celui de
l'incapacité du système capitaliste à satisfaire les besoins les plus
élémentaires de l'immense majorité des êtres humains. C'est pourquoi le
prolétariat, qui est la seule classe capable de renverser ce système et
de construire une nouvelle société d'abondance (débarrassée de la
marchandise et donc de la misère) détient la clé de l'avenir. Il y a
160 ans, dans Misère de la Philosophie, Marx mettait en avant contre
Proudhon qu'il ne faut pas voir dans la misère que la misère mais le
ressort même de la lutte de classe qui rend possible la nécessité de la
révolution : "la condition d'affranchissement de la misère et de
l'exploitation de la classe laborieuse, c'est l'abolition de toute
classe". [1]
W. Courant Communiste International
[1] Plus que jamais, le marxisme reste la seule théorie vivante de la
classe porteuse du communisme. Karl Marx n'était ni un guignol ni un
clown (contrairement à ce que prétendent les "humoristes" du Capital
qui cherchent à escroquer les ouvriers et à leur vendre leurs "best
sellers" . Voir la couverture d'un livre très commercial intitulé
"Prolétaires de tous les pays, excusez-moi"). C'est bien la lutte des
prolétaires de son époque qui avait permis à Marx d'examiner et
d'analyser la dynamique historique du capitalisme avec un télescope (et
non avec des verres déformants). Le mot d'ordre du Manifeste de 1848
"Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !", est toujours
d'actualité. .
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