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 Lettre d'un professeur d'art pla. au collège

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MessageSujet: Lettre d'un professeur d'art pla. au collège   Lettre d'un professeur d'art pla. au collège Icon_minitimeLun 9 Juin - 18:04

Voici une lettre d'un professeur d'art plastique au collège qui s'adresse aux dirigeants de l'Education nationale, qui s'indigne des nouveaux programmes :

Citation :
08 juin 2008

à Mesdames et Messieurs les Inspecteurs Généraux,

à Mesdames et Messieurs les Inspecteurs d'académie,

A M. Le Ministre de l'éducation,

Consultation sur les nouveaux programmes d'arts plastiques du collège

Comme vous nous invitez à nous prononcer sur les nouveaux programmes, quand bien même je n'aurai aucune illusion de l'utilisation faite de cette consultation sinon le vernis démocratique, je ne saurai me soustraire à la politesse de vous répondre.

Je pourrai me contenter de reprendre point par point, niveau par niveau les contenus et les objectifs, je pourrai me contenter de renvoyer l'écriture et ces programmes aux cadres généraux de l'éducation européenne, je pourrai me contenter d'une réponse lapidaire de l'ordre du jugement de valeur, je pourrai encore me contenter de ne pas me prononcer sur le fond pour ne conserver que la forme – et la manière-, ne pas me prononcer sur la faisabilité pour ne me contenter que du fonctionnement proposé.

Déformation professionnelle sans doute, les liens entre tous les enseignements de l'école et de tous niveaux, les perspectives tracées, la prise en compte tant des ages de nos élèves – qui parfois sont aussi nos enfants – que de leur ancrage dans leur temps ... tout cela compose notre enseignement et nos pratiques éducatives. Les pratiques artistiques sont des pratiques rigoureuses qui allient les méthodes et les expérience, la prise de risque et la construction d'identité, la prise en compte du présent et toutes les dimensions du temps, du réel comme de la construction de l'imaginaire -qui est la condition du savoir raisonné-, des connaissances et des acquis de chaque élève, de la construction de la pensée par la maîtrise de la langue tant parlée qu'écrite, débattue et échangée -donc socialisée- que secrète et en travail -donc individualisée- .

Alors pourquoi ne pas s'inscrire dans une continuité et rappeler les liens avec les programmes précédents ? Sauf à penser que les écarts, « écarts » auxquels nous sommes particulièrement attentifs dans les pratiques de nos élèves entre leurs intentions et leurs réalisations, sont d'une autre nature et s'inscrivent dans un autre champ d'intentionnalité.

Par comparaison avec les programmes antérieurs -et donc avec nos pratiques d'enseignement actuelles-, ces intentions me semblent de réduire le champ de la pratique artistique pour lui substituer des maîtrises théoriques et opératoires. Orientations cohérentes avec la RGPP et les autres mesures « d'économies » mais tout à fait inquiétantes sur le plan de la pédagogie et de l'éducation : nos élèves, les adolescents ont besoin de se confronter au réel, de manipuler, d'être acteur aussi de leurs apprentissages. Quant au contenu et au déroulement de la progression des « arts plastiques » sur les quatre ans du collège, ce qui est annoncé rompt avec un de nos postulats : la variation des situations et des modalités de cours, postulat nécessaire pour permettre à tous les élèves, quelque soit leur mode d'acquisition, de construire des savoirs et de progresser, nécessaire aussi pour corréler les notions et les enjeux. Centrer une thématique sur chaque année, malgré notre professionnalisme et la matière potentielle pour chacune d'entre elles – matière presque trop riche du coup -, c'est courir le risque de la répétition, de l'ennui et de la monotonie pour nos élèves. De ce point de vue ces programmes ont le double mérite paradoxale d'être à la fois trop vaste et trop imprécis pour être applicable ...

Et des écarts sont là quantifiables. A commencer par l'histoire de l'art. Et par l'utilisation du numérique à laquelle s'allie « la maîtrise des techniques usuelles de l'information et de la communication ».

A poursuivre entre le temps imparti à la discipline pour chaque élève et la masse progamatique.

A continuer entre les priorités qui ne manqueront de se faire jour -du fait notamment des orientations en matière d'histoire des arts et de leur place au brevet, nous y reviendrons- et la quantité de ce que nous ne pourrons engager du fait tant des dominantes locales – dans le cadre de l'autonomie des établissements mais aussi des orientations en terme pédagogiques et éducatives, notamment en liaison avec le socle commun et la prise en charge des difficultés scolaires.

Dans ce cadre là, que signifie : « tout en s'assurant de maintenir des exigences de l'enseignement, ils [les enseignants] peuvent ainsi mettre en oeuvre des situations pédagogiques particulières : organisation de la classe, du temps scolaire, modalité de cours. »^1 <#sdfootnote1sym>. « Organisation du temps scolaire » ? La durée du cours ne serait-elle plus de 55 minutes pour tous ? Pourrons nous envisager que tous les élèves ne bénéficient pas du même temps, qu'il faudra varier les conditions d'accueil, Voilà donc une notation marginale qui mérite éclaircissement.

Des questions ne cessent de se poser en matière de cohérence globale. Nous ne pouvons que louer les intentions : « construire une culture faite de repères dans le temps et dans l'espace, ils [les arts] apprennent parallèlement aux élèves à exprimer et communiquer par l'art. (...) ces deux enseignements [éducation musicale et arts plastiques] contribuent à l'élaboration d'une véritable culture humaniste »^2 <#sdfootnote2sym>. Hormis que nous sommes déjà les principaux vecteurs de ces intentions, dans nos pratiques comme dans l'articulation avec l'histoire des arts, hormis que nous avions déjà la charge du développement de l'esprit critique et de la construction autonome de nos élèves, nous ne saurions fermer les yeux ni ignorer que les programmes que nous sommes sensés poursuivre et approfondir, ceux du *primaire*, seront réduits à l'état ... d'intention. Nous ne pouvons que supposer que nos élèves de 6° connaîtrons sans doute quelques oeuvres mais auront-ils eu des temps de la pratique ?

Pourquoi ne rien introduire quant au brevet dans les programmes alors que dans le BO n°19^3 <#sdfootnote3sym> une mention claire y est inscrite : « *Une épreuve obligatoire sera créée au diplôme national du brevet,* à compter de la session 2009, visant à sanctionner les connaissances et les compétences acquises dans le domaine de l'histoire des arts. A cette occasion, les élèves pourront également valoriser une pratique personnelle, développée dans ou en dehors de l'école. »

Ce passage -et son absence dans les programmes- soulève trois interrogations :
*
l'histoire de l'art devient l'axe majeur de notre enseignement
comme mode commun et plus efficace d'évaluation. Il est probable
que nous ne pénaliseront pas nos élèves et que nous organiserons
nos cours de manière à ce qu'ils réussissent, ce qui ne peut que
s'envisager au détriment de la pratique, ce qui ne peut se
comprendre qu'au vue des contraintes budgétaires et d'un moindre
mal intellectuel, ce qui ne peut s'entendre que comme une
transformation profonde de notre discipline ;

*
l'éducation nationale va aussi valider des connaissances acquises
« en dehors de l'école » (« A cette occasion les élèves pourront
également valoriser une pratique artistique personnelle développée
dans ou en dehors de l'école. »^4 <#sdfootnote4sym>?

*
la pratique deviendrait-elle facultative, dans tous les cas
seconde voire plus du tout prioritaire ?

Avec la mise en oeuvre de ces programmes qui font la part belle à la manipulation et à l'acquisition des outils *numériques*, la pratique est mise à distance, et avec elle, c'est la confrontation et l'expérience du réel qui s'en trouve de nouveau distanciée. Alors que de nombreuses études, que de nombreux observateurs des adolescents tant sur le plan social que médical s'alarme des pratiques d'addiction à ces nouveaux outils, il faudrait que nous en fassions une priorité ? Nous pourrions encore relever que l'acquisition de ces logiciels et de ces outils (2D – 3D – montage vidéo numérique) nécessitent autant de compétence que de temps et que nous ne saurions les survoler sans valider l'illusion de la maîtrise.

Nous pourrions aussi relever que parmi les objectifs de la 6° à la 3° - passer de la recherche sur internet à la diffusion et à la publication en ligne - n'étaient-ce pas aussi les missions de nos collègues documentalistes ? Prendrions-nous leur place ?

Sans compter qu'un train de mesures présentées comme « réforme » a des arguments budgétaires et que ces équipements comme ces logiciels sont coûteux et importants ; sans compter qu'une fois acquis,il faut en assurer la maintenance et la mise à jour.

Rien n'est pour l'instant non plus indiqué sur le type de logiciels retenus : licence propriétaire, GNU ? Non seulement les philosophies sont différentes mais les coûts afférents pour les budgets des établissements ne seront pas non plus les mêmes.

Rien n'est clairement précisé des liens entre ces nouveaux enjeux disciplinaires et les nécessaires accords avec la loi DADVSI qui limitent les usages et les droits. Il serait tout de même absurde que nous enfreignons la loi pour pouvoir faire notre métier et remplir nos missions.

En matière d'équipement de salle, les programmes contiennent des préconisations qui ne sauraient être satisfaisantes au regard d'un enseignement à destination d'une classe entière. A moins d'envisager qu'à chaque salle d'arts plastiques soient associées une salle multimédia, autrement dit, que les surfaces de travail soient doublées, ce qui ne semble pas être l'orientation retenue ... sans compter que dans nombre d'établissements cela ne sera de toute façon pas possible.

Et rien n'est explicité en terme de formation.

Enfin, il n'est nulle part fait référence aux acquis développés et validés au cours du primaire et pourtant, et au moins pour les 6°, de nombreux points communs existent ce qui reviendrait à refaire ce que nos élèves sauraient déjà.

Les ambitions et les contenus de ces programmes semblent faire fi du *temps de cours* dont nous disposons avec nos élèves et de la durée nécessaire à l'acquisition, la manipulation et la maîtrise des outils comme des logiciels. Nous pouvons nous demander quels seront les choix opérés par nos collègues – en fonction de leur compétences, en raison de leur équipement, mais surtout en raison des priorités scolaires et institutionnelles pour nos élèves : il est évident que nous ne saurions manquer à l'obligation qui nous est faite de préparer nos élèves à l'épreuve d'histoire des arts, comme aux manipulations numériques qui ne sauraient être exclues du B2I. D'ailleurs, est-ce que les arts plastiques n'auraient pas du coup mission de former à ce brevet – commencé dans le primaire – en prenant du coup la place des collègues et des disciplines qui en avaient jusqu'à présent la mission : documentalistes et professeurs de technologie ?

En conclusion (provisoire), à la lecture et à l'analyse de ces nouveaux programmes, tant pour ce qu'ils annoncent que pour les creux, je considère qu'ils inaugurent une nouvelle ère d'une discipline appelée « arts plastiques », que cette nouvelle ère promet d'être celle de l'absence de pratique soit une manière implacable de vider cette discipline de sa substance, de ses contenus comme de son histoire. Qu'ainsi nous allons inaugurer un nouveau métier au coeur de l'enseignement sans même changer de casquette ce qui ne pourra que contribuer à brouiller davantage les cartes ; qu'ainsi nos élèves perdront une pratique dont nombre d'entre eux ont non seulement besoin mais jugent nécessaire.

Enfin, ne confondons pas raison et précipitation. Proposer à cette période ci de l'année scolaire des programmes aussi lourd de modifications et de conséquences pour les mettre en application à la rentrée paraît pour le moins ... impossible : entre le dépouillement, et l'analyse du texte puis son passage à l'assemblée pour le voter, voter ensuite et publier les décrets d'application -sans lesquels la loi ne peut s'appliquer- relève d'un coup de forceps sur le calendrier législatif ;
sans compter que les livrets d'accompagnement ne sont pas à disposition des enseignants et ne le seront sans doute -et au mieux- qu'à la rentrée : comment dans ces conditions croire au souci de qualité annoncé et au respect des élèves et des enseignants qui doivent, devrions nous le rappeler « préparer » ces cours ? ;
que c'est la première fois que je vois des programmes scolaires calés sur une année ... civile : application en 2009 est-il écrit, mais 2008-2009 ou 2009-2010 ? ; devons-nous considérer que ces programmes, comme ceux du primaire se substitueront brutalement et unilatéralement aux programmes en cours ? ;
que ces programmes et la consultation repose sur une série de "trous" pour le moins inquiétants qui font l'impasse sur d'autres textes qui eux, ont été votés et publiés au BO. Un exemple, il y en a sans doute d'autres, une épreuve d'histoire des arts est officialisé au BO de mai 2008 mais n'apparaît pas dans les programmes des arts plastiques, de français et d'histoire géographie de collège ...

Tout cela m'amène à poser des questions de conformité constitutionnelle.

La "chose" éducative est une affaire de responsabilité professionnelle mais aussi citoyenne qu'il ne faudrait pas brader parce que nous ne voyons pas et/ou que nous ne relevons pas les manquements de ces procédures. Ou que nous céderions à des objectifs non explicités qui pourraient, par exemple, être ceux de la mise en conformité de notre éducation nationale aux normes du traité de Lisbonne et de son principe « d'employabilité » plutôt que de permettre à nos élèves de construire réellement des savoirs et des méthodes, plutôt que de permettre sérieusement d'ancrer des connaissances à la fois dans une histoire commune par des pratiques cohérentes ouvrant sur des choix individuel permettant de construire une vie adulte fondée sur le bien être et une véritable culture.

Vous priant de croire à mon attachement profond aux missions d'éducation et aux services qui le permettent,

laurent Desert
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